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loizemarechal

Micro coup de foudre

Si la femme émet un ovule (rarement, deux ou trois !) durant son cycle menstruel, l’homme envoie, lui, des centaines de millions de spermatozoïdes au combat à chaque rapport sexuel non protégé. Et contrairement à ce que l’on pourrait croire, leur rencontre est plus organisée qu’il n’y parait.


En effet, on peut déjà se demander si le hasard est vraiment le seul paramètre en jeu dans la fécondation. La question s’est d’abord posée à propos des animaux dont la fécondation se déroule en dehors du corps, comme les coraux, les étoiles de mer ou encore les poissons. Chez ces animaux, les œufs et la semence sont émis dans un milieu ouvert et sont donc sujets à la dilution dans l’eau, et peuvent être emportés par les courants. Pour que la reproduction soit efficace, il faut donc que les œufs « guident » les spermatozoïdes jusqu’à eux. Alors que l’on a longtemps pensé que de tel mécanismes d’attraction des spermatozoïdes étaient inutiles chez les animaux dont la fécondation avait lieu à l’intérieur du corps de la femelle, comme les mammifères, le contraire a été démontré dès les années 80.

Il semblerait donc que comme chez les animaux à fécondation externe, l’ovule et les cellules qui l’entourent émettent des substances chimiques qui attirent les gamètes mâles comme un doux parfum. Vous me direz : les spermatozoïdes n’ont quand même pas de nez ! Pourtant, c’est le même principe. D’ailleurs, certaines protéines exprimées à la surface des spermatozoïdes et impliquées dans cette attraction chimique vers l’ovule font partie de la même famille que ceux que l’on retrouve dans les nerfs du système olfactifs. Du côté de l’ovule, il semblerait que la progestérone sécrétée par la couche de cellule entourant l’ovule participe à l’attraction des spermatozoïdes, mais d’autres molécules attractrices, notamment émises par l’ovule lui-même restent à découvrir.


L’activation des récepteurs à la surface des spermatozoïdes va déclencher toute une cascade de réactions biochimiques qui n’est pas entièrement élucidée. On sait cependant qu’elle va globalement induire un changement dans la manière dont les spermatozoïdes nage ce qui va leur permettre de rejoindre l’ovule plus activement. En quelques sortes, on peut dire que plus le spermatozoïde s’approche de l’ovule, plus il « capte » les molécules attractrices, plus sa nage est efficace. Un cercle vertueux !


Plus intéressant encore, il a récemment été démontré que l’ovule a un certain contrôle sur les spermatozoïdes qu’il attire : une étude de 2020 menée conjointement par l’Université de Stockholm et l’Université de Manchester a montré que lorsque l’on exposait des ovules à des échantillons de sperme provenant d’hommes différents, la nature et la quantité de molécules attractrices variaient en fonction des échantillons. Certains ovules semblaient vouloir attirer plus efficacement certains échantillons de spermatozoïdes en particulier.

Si l’on pense aux espèces animales où la femelle autorise plusieurs mâles à se reproduire avec elle, de tels mécanismes pourraient représenter une sorte de sélection naturelle microscopique pour favoriser les spermatozoïdes provenant du mâle le mieux placé pour engendrer la meilleure descendance.


Chez l’humain, en revanche, la sélection d’un ou d’une partenaire se fait sur des critères psychologiques conscients et inconscients trop complexes pour être retranscrite en une simple formule chimique. Le degré de « compatibilité reproductive », alors indépendant du choix du partenaire, pourrait participer à expliquer les cas d’infertilité inexpliquée rencontrés chez un certain nombre de couples qui s’aiment pourtant très fort.


Références : Milardi, D., Colussi, C., Grande, G., Vincenzoni, F., Pierconti, F., Mancini, F., ... & Pontecorvi, A. (2018). Olfactory receptors in semen and in the male tract: from proteome to proteins. Frontiers in endocrinology, 8, 379.

Oren-Benaroya, R., Orvieto, R., Gakamsky, A., Pinchasov, M., & Eisenbach, M. (2008). The sperm chemoattractant secreted from human cumulus cells is progesterone. Human reproduction, 23(10), 2339-2345.


Duan, Y. G., Wehry, U. P., Buhren, B. A., Schrumpf, H., Oláh, P., Bünemann, E., ... & Homey, B. (2020). CCL20-CCR6 axis directs sperm–oocyte interaction and its dysregulation correlates/associates with male infertility. Biology of reproduction, 103(3), 630-642.


Fitzpatrick JL, Willis C, Devigili A, Young A, Carroll M, Hunter HR, Brison DR. 2020 Chemical signals from eggs facilitate cryptic female choice in humans. Proc. R. Soc. B 287: 20200805. http://dx.doi.org/10.1098/rspb.2020.0805




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